Brèves prospectives

QUELLE POLITIQUE FORESTIÈRE POUR DEMAIN ?

Erscia est un gigantesque complexe industriel de sciage et de production d’énergie renouvelable au cœur du Morvan. Critiqué d’un point de vue environnemental et économique (destruction des industries locales, perte de ressources touristiques, transport vers une usine d’électricité en Belgique), le projet dessine surtout une nouvelle manière d’exploiter les forêts.

Pour son promoteur l’enjeu est la production massive de bois énergie pour alimenter, entre autres, les chauffages au bois. La France mise en effet principalement sur la biomasse pour honorer ses engagements d’énergies renouvelable, un créneau tellement prometteur qu’une scierie est entrée en bourse en avril dernier. Une des solutions amenées pour lutter contre la « double-peine » du secteur (à l’augmentation du prix de la matière première due à la forte demande mondiale, s’ajoute la concurrence avec des produits qui reviennent bien moins chers d’Asie, du fait de taxes à l’export nulles) est en alors la création d’une « diagonale des scieries », des Vosges aux Landes, avec quatre ou cinq énormes unités, comme Erscia. L’objectif est là d’exploiter plus fortement la forêt, au risque de dépasser les 75 % de taux de prélvement, seuil à partir duquel il y aurait une concurrence interne à la filière entre production de biomasse, fabrication de papier et entreprises d’ameublement, deux secteurs déjà très fragilisés.

Outre la question des arbres à planter (la monoculture de résineux comportant des risques financiers à long terme et rendant la forêt plus fragile face aux ravageurs et aux risques climatiques), ce modle questionne également le rôle des artisans, les circuits courts et la formation : question valeur ajoutée, le meilleur usage du bois, c’est le bois d’œuvre ; aujourd’hui si le bois est local et non traité, il n’est plus assuré par la garantie décennale ; et les savoir-faire disparaissent, le CAP de charpentier, étant bien plus orienté vers la mise en œuvre de systèmes industriels que vers le travail du bois malgré les nombreuses demandes en ce sens.

Pour favoriser les filières courtes, certains professionnels s’organisent collectivement. En Chartreuse, ils ont ainsi crée un stock collectif de bois local répondant aux différents besoins pour la construction de charpentes et de maisons à ossatures en bois, et simple pour l’acheteur. Alors que se profilent aussi le grand chantier de la rénovation thermique, et le regain d’intérêt pour le bois comme matériau de construction plus écologique, se pose donc l’épineuse question du modèle de production…

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